lundi 31 mars 2014

Vox populi...

Les urnes ont parlé. Qu'on apprécie ou qu'on soit plein de tristesse,  d'amertume ou d'inquiétude pour l'avenir, c'est ainsi. "Vox populi, vox dei" dit l'adage, même si le "dei" se fait de plus en plus discret, au moins en apparence.
Ainsi la France des 36 700 communes a choisi. Même les plus optimistes, comme Jean-Claude Gaudin, l'indéboulonnable maire de Marseille qui, à 74 ans, rempile pour un 4ème mandat, n'en reviennent pas d'un tel raz-de-marée bleu profond. Les politologues avaient prévenu : avec plus de 130 villes perdues par la gauche, on pourra parler de tsunami. Et voilà qu'on en dénombre 155... Heureusement, quelques-unes sauvent l'honneur ; Grenoble par exemple où les ombres tutélaires de Pierre Mendes-France et de Hubert Dubedout, hommes intègres de la politique locale inscrits dans l'histoire récente, semblent avoir protégé un jeune écologiste porteur d'espérance, Eric Piolle. Pour beaucoup d'autres, le fauteuil laissé vide par un maire socialiste ou communiste n'est pas nécessairement synonyme de catastrophe : François Bayrou à Pau fera un bon maire centriste, en équipe pour l'Aquitaine avec Alain Juppé à Bordeaux. A Paris, l'UMP NKM a raté son coup, la socialiste Anne Hidalgo, beaucoup plus sympathique et rompue à la vie locale depuis 13 ans aux côtés du maire Bertrand Delanoë, récoltant les fruits de sa fidélité sans faille.
On pourrait égrener le chapelet de ces villes ayant basculé de gauche à droite, de droite au Front National, Marine Le Pen avec l'aide des medias ayant réussi à présenter le parti créé par son père comme un parti tout à fait fréquentable, un "parti d'adhésion" comme elle le définit maintenant elle-même.
La France ne va pas bien. Dans sa tête surtout. Et les résultats de ces élections le prouvent. Elle demande des résultats, des décisions énergiques, intelligentes. Pas des coups de cœur à l'italienne comme est en train d'en distribuer à tout-va le nouvel homme fort d'Italie, Renzi. La France est un pays rationnel, réfléchi, riche d'une longue histoire structurante et révolutionnaire aussi. Les électeurs ont dit beaucoup de choses avec leur bulletin de vote. Les grands débats de société sur le mariage pour tous avec tous ses corollaires, l'euthanasie ont inutilement réveillé de vieux démons sans mettre en scène les débats sérieux qui auraient permis de mieux comprendre les enjeux de tels bouleversements. Sans doute pour certains participants des "manif pour tous", l'occasion a été saisie d'exprimer leur rejet de ces avancées sociétales mal ficelées.
Au fond, ce qui a manqué le plus à ce gouvernement qui, sans doute, vit ses dernières heures, c'est l'art et la manière de savoir expliquer où il nous embarquait, pourquoi le président prenait de telles décisions, quelles perspectives économiques guidaient leurs choix, quel était le calendrier des mois à venir. En somme, l'équipe gouvernementale a totalement manqué de pédagogie dans notre société de l'image et de l'instantanéité !
Alors vox populi, vox dei ?
Sans aucun doute. Mais l'expression ne s'est pas figée dans le temps, malgré les apparences. Le latin est une langue vivante. Peut-être nos dirigeants devraient-ils relire leur "Guerre des Gaules" !

Nanette

vendredi 28 mars 2014

Eloge des bourrelets superflus

Jamais je n'ai autant chéri mes petits bourrelets superflus que depuis 48 heures... Grâce à eux, j'ai évité la fracture du col du fémur, la prothèse de hanche, des genoux et, pourquoi pas, le nez cassé, les pommettes itou et les lunettes en miettes !
Bon, j'exagère un brin mais sait-on jamais ?
Mes amortisseurs bien placés (bas du dos, épaules surtout) auxquels j'ajoute une absence totale d'ostéoporose et une énergie farouche m'ont aidée à me défaire avec un minimum de dégâts d'un malandrin qui en voulait à mon sac ! Comme çà, à 15 heures en plein centre-ville ! Non mais, et puis quoi encore !
Le grand gars, encapuchonné, me tape sur l'épaule, comme si on était copains. Je me retourne, il s'agrippe aux anses de mon sac en cuir que je portais, funeste habitude, en bandoulière à mon épaule gauche. D'instinct, je replie le bras sur le précieux sac (bourré de papiers administratifs, cartes bancaires, carnets de chèques, portable, enfin toute la panoplie d'un sac de femme, autre habitude funeste !) et je me mets à beugler :" espèce de petit merdeux !" etc. Mais lui tire de plus belle, la rue est totalement déserte et finalement je m'étale, lui tirant de toutes ses jeunes forces... Me voilà traînée sur le trottoir, toujours accrochée à ma bourse comme la moule sur son rocher. Vingt deux, il ne m'aura pas, le bougre ! Mais je commence à mollir... C'est là qu'interviennent mes précieux bourrelets dont je me passerais bien quand j'essaye un nouveau vêtement.
Sentant la force me manquer, je tente un "au secours !" voué à l'échec puisqu'il n'y a toujours personne alentour. Et, miracle, l'apprenti brigand détale, les mains vides ! Une voiture arrive enfin, le conducteur me demande ce qui se passe et file derrière l'encapuchonné qui, bien sûr, a disparu derrière un immeuble.
Sans doute ai-je été "sauvée" par l'arrivée opportune de cette voiture.

Rentrée chez moi et après avoir copieusement engueulé un malheureux SDF qui, devant la bouche de métro, me réclamait 50 centimes et qui se reçut en plein figure quelques vigoureux "ah ! vous, foutez-moi la paix, je viens de me faire agresser !" -c'est fou comme çà soulage de se lâcher- je m'aperçois que la manche gauche de mon manteau ne tenait plus que par un fil. Il a vraiment tiré fort, le gaillard...
Mâchée de partout, les genoux couronnés, un magnifique hématome à hauteur de la hanche, l'épaule endolorie, je savoure ma victoire : elle a résisté, la mémé !
Au fond, c'est çà qui a décuplé mes forces ; pas question de céder à la trouille ambiante. Mon instinct de conservation a parlé.
Et mes bourrelets ont fait office de gilet pare-balles. Alors pas question d'entamer un régime pour faire fondre une quelconque mauvaise graisse... Qu'on se le dise dans les chaumières !

Morale de l'histoire pour vous, mes sœurs qu'on appelle "personnes âgées" : ne pas sortir avec un sac en bandoulière. Préférer une pochette portée devant soi contenant le minimum de documents, d'argent liquide ou de clés. Et puis faire comme les Scandinaves : porter un sac-leurre, un vieux sac sans valeur dans lequel on met un vieux parapluie, un bouquin auquel on ne tient pas, quelques trucs pour faire croire que nous transportons le Saint-Sacrement en personne...
Si on nous attaque, on lâche tout et on rigole sous cape.
Mais be careful quand même...

Nanette

samedi 1 mars 2014

Guillaume Gallienne : ave, César !

L'Académie du cinéma a remis hier soir ses récompenses à l'ensemble de la profession pour l'année 2013. Guillaume Gallienne est sorti grand vainqueur de la compétition avec cinq César pour son film autobiographique tiré de sa pièce de théâtre : "Les garçons et Guillaume, à table !" dont j'avais dit ici, voici quelques semaines, tout le bien que je pensais.
César du meilleur film et du meilleur premier film, du meilleur acteur, du meilleur montage et de la meilleure adaptation. Le film a déjà enregistré plus de 2,5 millions d'entrées et a bénéficié d'une excellente couverture médiatique, Guillaume Gallienne, pensionnaire de la Comédie Française, étant par ailleurs chroniqueur hebdomadaire sur France Inter d'une émission littéraire de très bonne qualité.
Peut-on déduire de ces quelques précisions le quasi flop enregistré par l'autre film en compétition qui, lui, avait raflé déjà une montagne de récompenses prestigieuses, "La vie d'Adèle", Palme d'Or à Cannes, prix Louis Delluc et tant d'autres trophées glanés à l'étranger ? Le film d'A. Kechiche, lui aussi encensé par la critique, n'a pourtant attiré qu'un million de spectateurs en France et n'a remporté qu'un César, celui du meilleur espoir féminin attribué à la jeune Adèle. Quant au troisième film en compétition, traitant lui aussi d'homosexualité, "L'inconnu du lac", l'un de ses héros a reçu le César du meilleur espoir masculin.

Quatre mille représentants de la profession cinématographique participent au vote, ce qui peut laisser penser que les intrigues et les manipulations -qui existent certainement- sont tout de même minimes. Alors ces résultats reflètent-ils un certain état d'esprit de notre société ? Je serais tentée de le croire, notamment concernant notre attitude vis-à-vis de la quête de l'identité sexuelle, question tellement débattue en France depuis des mois !
Guillaume Gallienne a choisi de poser le problème sur le mode de la comédie et traite, si je puis dire, le sujet en creux : son entourage et en premier lieu sa mère le veulent homosexuel, et il s'emploiera, à force d'un courageux parcours du combattant, à se prouver à lui-même et aux autres qu'il ne l'est pas !
Adèle vivra, elle, une expérience extrêmement douloureuse, violente, à la fois destructrice et perverse de la découverte de l'homosexualité à vif, crue, sans modération. Le réalisateur aborde le sujet de plein fouet, avec des scènes, longuement décrites dans les medias, qui en ont découragé plus d'un d'aller voir ce film. Quant à "L'inconnu du lac" -que je n'ai pas vu- il semble qu'il parle de l'homosexualité masculine plus classiquement mais aussi en images très explicites.

Notre société, travaillée par la question du mariage homosexuel, du genre, de l'éducation sexuelle à l'école, n'est-elle pas un peu lasse de tous ces débordements ? N'a-t-elle pas envie d'un peu de pudeur et de retenue sur ces sujets touchant à notre intimité ? A force de déverser sans modération des mots, des idées, des a priori, des clichés, des images, des reportages et que sais-je encore, exposant, décortiquant nos questionnements les plus intimes, n'en est-on pas arrivé à plébisciter un film qui, sans être un chef d'œuvre cinématographique, parle de ce sujet avec pudeur et retenue, avec légèreté et tendresse, respect et courage ?
Alors tant mieux si Guillaume Gallienne, ce garçon si "bien élevé", si "comédien français" dans son élocution même et sa façon très XVIIIème siècle de dire avec une si belle émotion contenue : "Quelle soirée, nom de bleu !" est reparti chez lui croulant sous les César ! Tant mieux pour lui et pour le cinéma français... Les cinq statuettes sculptées par César ont fait de lui l'empereur de la soirée !
Mauvaise note, par contre, pour les cameramen insistant avec impudeur sur le visage de Julie Gayet, assise dans le public, nommée elle aussi pour un César (qu'elle n'a pas eu !) pour son petit rôle dans le film "Quai d'Orsay". Elle était en compétition avec la mère de Carla Bruni, elle aussi nommée pour sa participation dans un film de sa fille, Valérie. People, quand tu nous tiens...
Heureusement, c'est l'admirable Sandrine Kimberlain qui a reçu la statuette de la meilleure actrice pour son interprétation de magistrate coincée dans le film d'Albert Dupontel "Neuf mois ferme".
Et l'inaltérable Roman Polanski s'est vu remettre lui aussi un César, celui du meilleur réalisateur, pour sa "Vénus à la fourrure" qui ne comptabilise, pour l'instant, que 125 000 entrées...
Les voies des César sont impénétrables...

Nanette