mercredi 18 mars 2015

TUNISIE - Pleure, ô pays bien aimé

Je ne sais pourquoi, il me revient en mémoire le titre de ce livre qui marqua profondément mon adolescence : "Pleure, ô pays bien aimé", de l'Africain du Sud Alan Paton.
La Tunisie, les Tunisiens et tous leurs amis vivent l'horreur depuis cet après-midi ; une horreur qu'une fois encore nous avons pu suivre en direct sur BFMTV : l'intrusion de trois faux soldats armés de kalachnikov dans le musée du Bardo, la prise d'otages d'une centaine de touristes et la mort de 22 personnes dont 17 touristes étrangers, d'une femme de ménage du musée, de deux policiers et de deux terroristes, le 3è ayant été attrapé par les policiers.
Voilà résumé en quelques mots et quelques chiffres un événement d'une gravité aussi radicale que ceux que nous avons vécu à Paris les 7, 8 et 9 janvier derniers : l'assassinat des journalistes de Charlie Hebdo, des clients de l'hyper cascher et de deux policiers.
Alors pourquoi ce livre datant de 1948 et traitant de l'apartheid sud-africain me revient-il de façon lancinante ? A cause sans doute de la beauté de son titre : pleure, ô pays bien aimé.
Oui, pleure, chère Tunisie, pleure sur ta déception immense de voir foulés aux pied, sous les tirs de la kalach mortelle tous les efforts, les trésors d'intelligence et de courage qui se vivent sur ta terre depuis ce magnifique 14 janvier 2011 et son historique "Dégage !" chassant le sinistre Ben Ali.
Pleure sur les ruines qui s'amoncellent jour après jour sur tes espoirs de reconstruction, de renaissance, de remise en route de la démocratie à la tunisienne, c'est-à-dire si différente de la nôtre, corsetée dans notre laïcité gagnée au fil des siècles. C'est trop bête à la fin !
Pays bien aimé aux senteurs de jasmin, au passé millénaire fait de raffinement et de culture, au présent chargé de promesses pour un avenir enfin capable d'associer démocratie, islam et liberté de conscience, ne te laisse pas abattre par le malheur. Tes ennemis sont nos ennemis. On les connait, on tente de les combattre, chacun avec ses armes selon ses responsabilités.
Le peuple tunisien entonnait déjà tout à l'heure, devant le Bardo, cet hymne national qui m'avait tellement ému lorsque je le découvrais chanté par deux mille hommes et femmes au Palais des Congrès de Tunis en mars 2012. Un chant montant de la terre avec la force des vainqueurs, de ceux qui ne se laisseront pas dicter la route à suivre.
Pour la splendeur des mosaïques magnifiées au  Bardo -le plus beau musée qu'il m'ait été donné de voir, avec l'Ermitage- pour la beauté des paysages bibliques des montagnes et des plaines qui ont conservé toute l'histoire de cette contrée, pour la douceur et la chaleur de ces millions de Tunisiens qui ne demandent qu'à vivre en paix, cesse de pleurer, ô ma Tunisie... Sinon, ils auraient gagné !

Nanette

mardi 17 mars 2015

Elections : RE-VO-LU-TION-NAIRE !

Dimanche prochain, nous allons voter pour élire des conseillers départementaux siégeant dans les antiques conseils généraux. Des sondages prédisent plus de 60% d'absentions. Il semblerait que tout le monde -ou presque- se fiche totalement de la gestion de l'action sociale, premier budget du département, de la gestion des collèges et de la voirie etc.
Et pourtant : nous allons vivre une véritable révolution électorale qui risque d'influencer durablement la vie de la société française.
Pour la première fois de notre histoire, nous désignerons un binôme homme/femme en mettant notre bulletin dans l'urne ainsi qu'un second binôme de suppléants. D'où parité complète sur les bancs des assemblées départementales ! Génial ! Il fallait y penser ! La France est ainsi le premier pays au monde à réaliser concrètement cette fameuse parité homme/femme qui rechigne tant à se mettre en place. Du coup on a très sensiblement réduit le nombre de cantons -presque de moitié- et redécoupé les territoires pour un meilleur rééquilibrage du nombre d'électeurs.
Ainsi les bancs des assemblées départementales accueilleront-ils autant d'hommes que de femmes, ce qui se traduira forcément par un autre climat, une autre façon d'aborder les problèmes, notamment sociaux, une autre vision des choses. Et puis, cerise sur le gâteau, la composition du sénat s'en trouvera elle aussi largement bouleversée : ce sont les grands électeurs, autrement dit les conseillers départementaux, qui élisent les sénateurs. Vous verrez que d'ici peu nous aurons une femme présidente du sénat !
On sait qu'en cas de vacance de la Présidence de la République, c'est le président du sénat qui assure l'intérim. D'ici qu'une femme se retrouve à l'Elysée... Par la petite porte peut-être, mais une fois dans la place...

Ce serait tout de même un peu plus intéressant de raconter tout çà aux Français, en ces derniers jours de campagne électorale totalement atone. Tous les medias nous servent la soupe de la famille Le Pen au grand complet : le vieux papa aux calembours suspects, la grande fifille au sourire carnassier et terrifiant, la petite nièce blonde comme Tata et gnaqueuse comme une teigne... A longueur de colonnes, d'émissions, d'interviewes, on ne voit qu'eux, on n'entend qu'eux, nous prédisant un avenir forcément chaotique et insupportable.
A croire que cet abrutissement des masses sert les intérêts d'un camp bien précis !

Nanette

mardi 10 mars 2015

Florence, sauvée par sa mère.

Tristesse. Grande désolation. Après le départ de Cabu et des autres, voilà que c'est au tour de la guerrière Florence Arthaud de tirer sa révérence... Dans un accident d'hélicoptère, ironie du sort... Bien sûr, il y a tous les autres, les neuf autres morts eux aussi dans cette collision tellement improbable.
Mais Florence Arthaud me touche encore plus que les autres. Question d'âge sans doute, de génération. Elle m'a accompagnée, j'ai suivi ses exploits incroyables sur toutes les mers du globe, ses coups de gueule, son courage à couper le souffle. Et aussi sa grande tendresse pour Pierre Bachelet quand ils chantaient ensemble. Ses quelques mots discrets sur sa fille.
Mais ce qui m'émeut peut-être le plus, ce soir en me remémorant le peu que je sais d'elle, c'est le récit qu'elle fit de son sauvetage en mer, une nuit de 2011 au large du Cap corse. J'entends encore sa voix racontant comment, en pleine nuit dans une Méditerranée déchaînée, coincée sous son bateau qui avait chaviré et voyant sa dernière heure arrivée, elle réussit à sortir son téléphone portable de son pantalon et à faire le seul numéro dont elle se souvenait malgré l'horreur du moment : celui de sa mère.
Puissance du cordon ombilical malgré les années, malgré l'indépendance forcenée, la liberté revendiquée et assumée... Au pire moment de son existence, c'est à sa mère que s'accrochait la navigatrice impétueuse avec la force du désespoir. Et c'est grâce à elle que Florence fut sauvée ! Une sorte de deuxième naissance.

A quoi, à qui pensa-t-elle en ces ultimes secondes lorsque les deux hélicoptères se télescopèrent hier à cent mètres d'altitude seulement, devant des dizaines de personnes tétanisées et impuissantes ? Je n'ose l'imaginer...
Déjà la mort de son alter ego, Eric Tabarly, assommé par un morceau de bois de son voilier alors qu'il naviguait seul, m'avait profondément touchée. Celle de Florence Arthaud ravive ce sentiment d'immense tristesse. Hors du commun, ces artistes nous apportent mieux que du rêve ; ils nous enseignent à vivre.

Nanette