mardi 28 mai 2013

Le Sacre du printemps, enfin !

C'était il y a un siècle. Cent ans tout ronds !
Le 29 mai 1913, sur la scène du Théâtre des Champs-Elysées à Paris, Igor Stravinsky donnait en création mondiale son "Sacre du printemps" dansé par le génial Nijinski, et le tout-Paris culturel s'enflammait contre cette œuvre révolutionnaire, véritable hymne païen rendu à la nature. On eut droit à une nouvelle "bataille d'Hernani", déclenchée quelques années plus tôt entre les partisans et les adversaires de Victor Hugo, auteur de cette pièce qui restera dans l'histoire littéraire du XIX ème siècle comme "la querelle des anciens et des modernes".
Plus personne aujourd'hui n'aurait l'idée ou l'envie de contester le chef d'œuvre de Stravinsky dont il existe plus de deux cents chorégraphies différentes à travers le monde. Les deux plus fascinantes étant encore celle de Maurice Béjart, datant de 1959, et celle d'une beauté absolue, de Pina Bausch, écrite en 1975. Et comment oublier la version dirigée par Pierre Boulez à la tête de l'orchestre de Cleveland, devenue la référence incontournable.

Cent ans ont passé. Avec eux, deux guerres mondiales ayant fait 70 millions de morts.
Et nous voilà, nous Français, affrontés à une nouvelle "bataille d'Hernani", certes au petit pied mais tout de même... Qui sont les "anciens" ? Qui sont les "modernes" dans ces affrontements à répétition autour de la loi instaurant le mariage pour tous ? Depuis six mois, nous nous étripons, nous débattons, nous ferraillons, dans les rues, au Parlement, dans des débats médiatiques sans fin, dans les familles et dans toutes les chaumières de France et de Navarre autour d'une question qui concerne... 0,6% des couples. Décidément, la France est un pays bien étrange...
Le temps, là aussi, "fera son œuvre" et les jeunes générations d'enfants des beaux quartiers, de la moyenne bourgeoisie de province, de toute cette France profonde d'habitude muette qui défilent sous les bannières de la "manif pour tous", vont découvrir les joies de l'engagement, du débat politique, des discussions passionnées autour de grandes questions sociétales. Tous ceux que nous avons vus, sur l'Esplanade des Invalides, au Champ-de-Mars, dans les rues parisiennes, enfants sur les épaules, poussettes en avant, drapeaux et oriflammes fièrement balancés au vent de l'histoire constituent maintenant une force vive dont il faudra tenir compte.
Peut-être s'agit-il d'un mouvement de fond ? Peut-être n'est-ce qu'un feu de paille que certains s'empresseront de récupérer politiquement ? Difficile de faire un pronostic.
L'Eglise de France ne sort pas grandie de cette affaire ; trop d'évêques se sont investis dans ces actions partisanes. Ils auraient du se limiter à leur prise de position initiale collective rappelant les fondamentaux de l'institution sans omettre les principes évangéliques.
Mais tandis que se déroule cette bataille dans un verre d'eau, la barbarie s'étale sur nos écrans : des fous d'Allah font sauter des voitures piégées un peu partout dans le monde, un soldat britannique est assassiné en pleine rue à Londres à coups de hachoir de boucher, des marathoniens meurent à New York par la folie de jeunes illuminés, des enfants sont pris en otage dans des écoles et on compte déjà cent mille morts en Syrie, face à un Occident tétanisé et impuissant.

Alors, oui, que vive le Sacre du printemps, cet hymne à la Vie dans ce qu'elle a de plus radical, de plus exigeant, de plus exaltant. Elle est notre origine et notre joie.

Nanette

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