dimanche 27 avril 2014

Quatuor papal : allegro vivace !

Ils étaient bien là, les quatre papes, sur la place St-Pierre noire de monde, en ce dimanche matin de canonisation. Bien là et tellement vivants qu'il était difficile d'admettre que deux d'entre eux n'étaient présents que par le truchement de petites fioles de sang enchâssées dans des reliquaires en argent. Jean XXIII, Jean-Paul II, Benoît XVI et François : quelle improbable et unique brochette papale que l'Histoire ne manquera pas de retenir comme exemple d'une institution en grande mutation... "Allegro vivace" ! aurait-on envie de rétorquer aux funestes prophètes qui voudraient enterrer avant l'heure une Eglise catholique déclinante, du moins en Occident.
Nous revenaient en mémoire, dans notre chair, des événements parmi les plus beaux du dernier siècle : le bon pape Jean, tout en rondeurs bienveillantes, maintenant saint Jean XXIII, lorsqu'il fut nonce à Paris sous le nom de cardinal Roncalli dans des périodes politiques fort agitées ou lorsque, fraîchement élu pape, il annonça d'une voix douce : "Nous voulons faire un concile", véritable coup de tonnerre parmi les princes d'une l'Eglise encore engoncée dans ses ors et ses fastes.
Et comment ne pas poursuivre notre cheminement à la fois humain et spirituel avec le splendide Jean-Paul II, à l'humanité tellement proche de la nôtre dans ses passions, journaliste, homme de théâtre, grand montagnard, homme aimé d'une femme qui, venant le voir un jour au Vatican, se précipita dans ses bras en l'appelant "mon bien-aimé" ! Lui, l'homme politique qui contribua à la chute du mur de Berlin, qui sut conquérir le cœur de millions de jeunes désorientés et leur offrir une boussole spirituelle en leur proposant des JMJ à travers la planète. Lui, devenu ce vieillard souffrant qui choisit d'exposer sa déchéance physique jusqu'aux portes de la mort, à l'image du Christ en croix.
Les deux portraits géants accrochés à la façade de la basilique St-Pierre nous rendaient ces deux hommes d'exception dans toute leur présence : le bon regard de Jean XXIII que l'on aurait aimé avoir pour grand père ; le regard d'une malicieuse et vive intelligence de Jean-Paul II offert comme un cadeau.

Fragile et humble, assis parmi ses confrères cardinaux et évêques, Benoît XVI, pape émérite si heureux d'avoir retrouvé la paix de l'âme et la compagnie de son piano au sein du monastère qui l'abrite dans les jardins du Vatican, fut longuement applaudi par la foule, place St-Pierre. Sans doute rendait-on hommage à ce grand intellectuel, théologien rigoureux et défenseur de la grande Tradition chrétienne plus que pasteur, artiste raffiné et délicat qui restera dans l'Histoire de l'Eglise pour ses écrits, sa dénonciation vigoureuse des scandales des prêtres pédophiles et sa courageuse renonciation au "trône de St-Pierre" lorsqu'il se sentit incapable d'affronter une trop grande modernité envahissante.
Et puis François : ce pape venu du Nouveau Monde comme il s'est lui-même défini, pasteur parmi les siens, qui ne cesse de dénoncer le scandale de la pauvreté et de la destruction de la planète, humble parmi les humbles, vivant le plus normalement du monde et s'entourant d'hommes compétents et ouverts pour gérer les dossiers les plus sensibles de l'Eglise. Capable aussi d'affronter jusqu'au péril de sa vie ceux qui le trouvent bien encombrant... Difficile d'être plus en phase avec la vraie vie et ses réalités profanes !

Oui, sans doute y avait-il  beaucoup d'allegro vivace dans les cœurs des 800 000 personnes réunies aujourd'hui à Rome pour rendre grâces à ce quatuor papal d'exception...

Nanette

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire